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7 déc. 2014

Reportage

L’ailleurs bouleversant de Strauss

Elsewhere, la danse contemporaine à un tout autre niveau.
14 octobre 2014, Karolane Messier

         Heidi Strauss renouvèle son œuvre en grand avec Elsewhere qui fut représenté du 1er au 4 octobre 2014 au théâtre Prospero. Sous la tutelle de la compagnie Danse-Cité, la chorégraphe présente une création de danse contemporaine sur le thème de nos actions quotidiennes et de leurs effets sur la vie des gens qui nous entourent.

Une volonté sociale?
Danielle Baskerville et Luke Garwood.
Crédit photo: Kathleen Smith, The Dance Current, 2011
            La compagnie Danse-Cité est fondée en 1982 par Daniel Soulières. Il a comme volonté de créer une compagnie qui évolue sans danseurs ni chorégraphes permanents. La compagnie tente de développer des projets qui font écho aux enjeux de notre société. Ils le font en encadrant des artistes du début à la fin de leur création. (C’est une compagnie polyvalente qui ne s’axe pas seulement sur la création de chorégraphes, mais elle donne beaucoup de place aux interprètes et aux artistes en périphérie de la danse qui sont très multidisciplinaires — vidéos, musique, poésie, danse, etc.)

            On retrouve aussi dans les antécédents de Strauss une certaine volonté de critique sociale. En effet, en 2013 elle présente avec Adelheid, sa compagnie fondée en 2007, un spectacle intitulé Still here, qui aborde les thèmes de l’apparence, de l’éventualité et des possibilités. 


Cause à affects

             Strauss, d’origine torontoise a présenté un nouveau spectacle au début de l’automne. Celui-ci a pour thème les affects, un phénomène qui la passionne énormément. Elle veut démontrer avant tout la capacité de l’humain à être transformé et à transformer. Strauss insiste également dans sa démarche à ce que les danseurs s’intéressent à leur capacité de résistance et d’adaptation en tant qu’être humain.
L’idée de la chorégraphie lui est venue tout simplement : « En observant les gens autour de moi, je me suis rendu compte qu’on s’affectait tous les uns les autres. Je me suis demandé comment faire pour transmettre cette idée en mouvement… » Elle voyait les affects dans tous les mouvements quotidiens que ce soit promener son chien, jouer au basket-ball ou tourner la page d’un livre. Pour la chorégraphe, les affects sont toujours présents.

             Pour Heidi Strauss, nous sommes affectés par nos expériences du passé — sensations, rencontres, succès et échecs —, mais aussi par les actions des autres. Elle insiste également dans sa démarche à ce que les danseurs s’intéressent à leur capacité de résistance et d’adaptation en tant qu’être humain devant des obstacles. Dans cette création, les danseurs s’oublient complètement. Ils laissent de côté leurs gestes quotidiens et réflexes habituels afin de redécouvrir de nouvelles façons de bouger en créant des liens — une sorte de réaction en chaîne entre eux grâces à des touchers ou effleurements. Il arrive parfois durant les représentations que les respirations et les bruits de pas des danseurs soient utilisés comme trame sonore. Ce concept ramène à la pensée des danseurs qui se doivent de performer en dépassant les limites.


Le tout début

             La création de l’œuvre dure 3 ans. C’est un long processus qui nécessite beaucoup d’observation. Ce n’est pas la complexité des mouvements, mais bien celle des enchaînements qui demande plus de temps et de concentration de la part des danseurs. Ils expliquent que le tout est long, car ils doivent se canaliser sur la coordination de leurs mouvements et ceux des autres. La représentation du spectacle les rend ainsi tous très fiers, car « c’est l’accomplissement de 3 ans de [leur] vie. »


             Consciente que son « spectacle à thème, sans histoire, est un gros risque », Strauss nous présente une expérience à couper le souffle. Cette dernière démontre son talent à exprimer un souci social par les gestes et le corps, et parfois même par les mots des danseurs qui tentent d’expliquer ce qui leur arrive au public. Un spectacle qui nous projette dans un tout autre monde et bien difficile à oublier.   

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